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C’est la rentrée ! Splendeurs et mystères des émotions…

Par Anne-Sophie de Chauvigny, Psychopraticienne, formatrice et coach certifiée en PCM

C’est la rentrée ! Tourbillon de vie droit devant !

C’est un temps privilégié d’expériences tout à la fois heureuses et inconfortables, joyeuses et effrayantes, vivantes et désordonnées. D’ailleurs, Charlotte n’a pas dormi cette nuit : nouveau collège, amis aux abonnés absents pour le moment, nouveaux profs, bref l’inconnu comme ligne d’horizon. Autant dire que Charlotte a peur, j’aperçois ses traits tirés au saut du lit et son visage fermé. J’essaie de la rassurer : «T’en fais pas ma chérie, ça va aller ! Tu vas t’en faire de nouveaux amis…». Devant sa moue dubitative, force est de constater que mes paroles ne sont guère efficaces.
Pierre est rentré de sa première journée d’école et ce soir, comme tous les soirs, je vais l’embrasser et lui souhaiter bonne nuit. Et là je le trouve en larmes. Entre deux hoquets il me fait part de son chagrin d’avoir été séparé de son meilleur ami. Aussitôt tel Zorro, j’enfile mon costume de sauveuse et je me mets à le consoler : «Ce n’est pas grave, mon chéri, vous êtes séparés juste pour la classe, tu vas retrouver Paul à la récré ! Et puis on l’invitera à la maison si tu veux !». Là encore, mes paroles n’ont pas l’effet magique escompté : Pierre continue de pleurer à chaudes larmes.
Devant toutes ses émotions qui s’expriment ici que faire ? Comment accompagner au mieux chacun ?

Et qu’est-ce qu’une émotion ?

«Rouge de colère», «blanc de peur», «vert de jalousie», «rose de plaisir» : voilà quelques expressions bien connues de chacun. Ces expressions associent une couleur à une émotion, couleur qui n’est autre qu’une manifestation physique qui se produit dans mon corps : je sens monter la chaleur, mon pouls s’accélère quand je contacte de la colère. Lorsque la peur me saisit, le sang se retire de mon visage et je deviens pâle. Ainsi, une émotion est souvent associée à une sensation physique : tremblements, changement du rythme cardiaque, palette de couleurs qui se dessine sur les joues etc…Tous ces signes, si j’y suis attentive quand cela se passe en moi ou si je les repère chez mon enfant, sont des sortes de «clignotants», «d’avertisseurs» qui m’indiquent qu’il se passe quelque chose, en moi, dans mon corps.
Ce quelque chose s’appelle une émotion. Une émotion au sens étymologique du terme signifie mettre en mouvement vers l’extérieur : ex-movere. L’émotion est donc quelque chose qui se passe en moi, dans mon corps, et qui va, si cela est permis, sortir de moi.
Une émotion est une réaction physiologique d’adaptation de mon organisme qui permet à notre espèce de survivre et de s’adapter.

Il existe six grandes émotions : peur, colère, chagrin, joie, surprise, dégoût auxquelles certains psychologues rajoutent la honte. L’émotion en soi n’est ni bonne ni mauvaise, elle est. Ce qui peut effrayer quand on parle d’émotions, c’est la décharge qui l’accompagne c’est à dire ses manifestations physiques : mon enfant se met à hurler, il tape du pied ou se roule parterre, ou encore il est pris de sanglots qui ne s’arrêtent plus comme pour Pierre. Que faire alors ?
Rassurer – dans le cas de Charlotte – ou consoler – dans le cas de Pierre – ne permettent pas de rejoindre l’autre dans ce qu’il vit. Au fond, n’est-ce pas moi que je suis en train de rassurer devant ce qui me trouble chez mon enfant ?
Charlotte a besoin que je la rejoigne et que j’entende sa peur. Pierre a besoin de déposer ce chagrin dans le cœur aimant de sa maman ou de son papa et d’être simplement entendu. «Oui, tes émotions, toutes tes émotions sont importantes, elles font parties de toi. Je ne les juge pas, je ne les jauge pas, je les accueille telles qu’elles sont.» Alors si je me place du côté de l’ado ou de l’enfant, c’est comme si le fait de déposer cette émotion au creux d’une oreille attentive et bienveillante me permet de décharger quelque chose, d’être entendu (e) dans qui je suis profondément, sans jugement aucun. Devant l’intensité de ce qui se passe pour moi, puisque tu es là papa, maman, nounou, simplement témoin empathique et sécurisant, cela devient supportable : J’existe et j’ai été entendu(e).
Point besoin de paroles parfois d’ailleurs, un regard, une présence chaleureuse, un geste suffisent.

Que se passe-t-il si je n’accompagne pas cette émotion, si je ne lui permets pas de s’exprimer, de se dire ? Il y a de grandes chances pour que ces émotions que je n’ai pas appris à dire finissent par exploser à un moment : c’est l’effet cocotte-minute : j’entasse, j’encaisse, j’engrange et puis à un moment donné c’est trop pour moi et ça jaillit, parfois contre moi, parfois contre l’autre, souvent avec violence. Contre moi, cela peut être les somatisations, les maladies, au fond les maux quand on n’a pas les mots pour le dire… Contre l’autre, c’est le fait de décharger et de rendre l’autre responsable de mon émotion : c’est ta faute si je suis en colère ! Non, mon émotion m’appartient, certes ce que tu viens de dire est venu cogner un bleu à l’âme, mais je suis responsable de mon émotion et de ce que je vais en faire.

Au contraire quand j’accompagne cette émotion, c’est la relation vivante entre mon enfant et moi. En accompagnant cette émotion, j’entre en relation avec toi, j’accueille pleinement qui tu es. Autrefois je posais la question suivante à mon enfant : «pourquoi as-tu peur ? pourquoi es-tu en colère ?» et puis j’enchainais «ben tu vois, si tu ne sais même pas répondre, c’est que tu n’as pas besoin de te mettre en colère !». Jusqu’au jour où j’ai senti qu’en posant cette question du pourquoi je ne donnais plus priorité à notre relation. Je me permettais de juger si oui ou non tu avais le droit/ tu pouvais te mettre en colère… De plus, cette question restait au niveau de la tête, quand une émotion se vit avec son corps. Aussi, voici maintenant la question que j’aime à poser : «De quoi as tu besoin maintenant ?» Peut-être vous entendrez parfois simplement : «j’ai juste besoin de pleurer…ou j’ai besoin que tu sois là…sans rien dire, à m’écouter».

Cet accueil des émotions de mes enfants, de l’autre n’est possible pour moi que si je suis au clair(e) avec mes propres émotions, que si j’accueille ce qui se passe pour moi et en moi avec bienveillance.
Quand je suis disponible à l’autre, prêt à le rejoindre là où il en est, alors se vit une relation authentique où chacun est accueilli inconditionnellement. C’est cette expérience que je vous invite à vivre dans ce tourbillon de la rentrée et tout au long de l’année !
Bonne rentrée à chacun !